• septembre 16, 2024
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Chronique d’un gourmand

Chronique d’un gourmand

« Ce matin, je me suis rendu dans la vallée du Lendou, au cœur du Quercy Blanc, pour rencontrer Cyril Solacroup. Cyril est un producteur de raisins, installé en GAEC avec sa maman à Saint-Cyprien, dans le sud du Lot. L’air est frais, et la saison du Chasselas de Moissac AOP bat son plein. Dès mon arrivée, je découvre un verger lumineux, baigné de soleil, où les grappes de raisins dorés pendent avec grâce sous les feuilles vertes.

Cyril m’accueille avec un sourire sincère. Il commence à me parler de ses vignes et de son attachement à cette terre. Ici, on cultive plusieurs variétés de raisins de table : le célèbre Chasselas de Moissac AOP bien sûr, mais aussi des cépages comme le Centennial, l’Exalta, et le Muscat. Toutefois, les tendances actuelles de consommation l’ont poussé à diversifier ses productions vers des variétés « apyrènes ». « Apyrène », me dit-il, signifie simplement des raisins sans pépins. Aujourd’hui, de plus en plus de consommateurs préfèrent ces variétés plus faciles à manger, et Cyril a su s’adapter pour répondre à cette demande.

Mais le Chasselas reste au cœur de son travail. Cyril tient à me faire déguster une grappe fraîchement cueillie. En croquant dans les grains, je découvre un équilibre parfait entre le sucre et l’acidité. Les arômes sont subtils et complexes : des notes de fleurs blanches, une douceur miellée, et une pointe de citron qui réveille les papilles. Le Chasselas de Moissac AOP est bien plus qu’un simple fruit, c’est une expérience sensorielle à part entière.

La discussion se tourne rapidement vers les défis auxquels Cyril, comme tant d’autres producteurs, fait face. « Aujourd’hui, la qualité ne suffit plus toujours », explique-t-il. Le pouvoir d’achat des Français est mis à rude épreuve, et bien que des produits comme le sien offrent une valeur gustative et nutritionnelle indéniable, ils peinent parfois à séduire un large public. Heureusement, des initiatives locales, comme l’association « Mangez Lotois », redonnent espoir. Cyril en fait partie et en parle avec enthousiasme. Cette association réunit une trentaine de producteurs engagés dans une agriculture durable et responsable, qu’elle soit BIO ou certifiée Haute Valeur Environnementale. Grâce à « Mangez Lotois », les producteurs peuvent approvisionner directement les collectivités locales en circuits courts, réduisant ainsi l’impact environnemental en mutualisant les tournées et en respectant la saisonnalité des produits.

 

 

Cyril m’explique que ce modèle de commercialisation permet non seulement de limiter les intermédiaires, mais aussi de garantir une juste rémunération pour les agriculteurs. Dans un monde agricole souvent malmené, cela redonne du sens à leur métier. Et cette initiative locale est la seule du département du Lot, ce qui en fait un exemple à suivre.

Je quitte Cyril avec un sentiment d’admiration. Malgré les difficultés, il continue à travailler avec passion, soutenu par une communauté de producteurs partageant les mêmes valeurs. Alors que je repars, une grappe de raisin à la main, je garde en tête ma volonté d’encourager les gens à consommer du raisin français. Qu’il soit avec ou sans pépins, ce fruit de nos terres, si bon pour la santé, mérite d’être savouré et soutenu.

Mangeons du raisin, croquons dans l’essence même de nos terroirs. »

Chronique d’un gourmand – © Arnaud Enjalbert