• janvier 6, 2025
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Accès à l’eau : Rénovation de puits et forages, solutions d’accès à l’eau

Accès à l’eau : Rénovation de puits et forages, solutions d’accès à l’eau

Jérôme Souques, sourcier-puisatier, s’est donné pour mission de rénover les vieux puits, une activité rarissime de nos jours. Il travaille avec Lionel Comby, foreur, directeur de l’entreprise BATCO. Tous deux présentent les intérêts de leur activité.

Comment optimiser un vieux puits ?

Jérôme Souques est à notre époque l’un des rares puisatiers de métier restants, et l’un des seul à rénover les puits anciens. « A l’époque, le métier de puisatier, traditionnel et central, était répandu. En revanche, rénover un puits en descendant dedans aussi profondément, ça ne se faisait et ça ne se fait toujours pas vraiment, c’est une activité dangereuse. Quand je descends dans un puits, j’amène tout un attirail : une potence supportant 3 treuils, un groupe électrogène, échelle et matériel de spéléologie, tube à oxygène… Et bien sûr, je suis assisté, je ne viens jamais seul. » Une compétence acquise lors de l’une de ses milles et unes vies : en effet, avant de s’établir dans sa nouvelle activité, lancée en 2023, Jérôme a d’abord été viticulteur et œnologue dans le Lot, pendant 30 ans, avant de se former en tant que cordiste-alpiniste, exercer comme chef de chantier… Ce qui lui a permis de participer à des chantiers exceptionnels, comme celui de la rénovation de la Cathédrale Notre-Dame, à la partie ‘Nettoyage et reconditionnement’, mais aussi sur des bâtiments comme Le Louvre, la Tour Eiffel…
« Un puits, c’est un ouvrage fantastique également, une œuvre d’art, même. Quand on me contacte pour créer un nouveau puits, si la personne en a déjà un, considéré comme perdu… Je vais plutôt m’occuper de rénover ce puits là, car il n’est pas perdu, et c’est dommage, le nombre de puits abandonnés aujourd’hui » explique Jérôme, fort d’une centaine de puits déjà rénovés à son actif. « En revanche, si le puits a été volontairement condamné… Il est techniquement possible de le déboucher, mais c’est beaucoup de travail et très onéreux, donc je ne le propose pas. »
Effectivement, il y a souvent confusion : ce n’est pas parce que l’on ne voit ou n’entendons pas d’eau, même en jetant un caillou au fond du puits, que le puit est forcément à sec. Souvent, avec les décennies, une couche très épaisse d’encombrants, de vases etc, peut se former sur la surface de l’eau, la rendant en apparence solide… « Il m’est arrivé de déboucher un puits avec un bouchon de 3 m d’épaisseur… (en moyenne, les bouchons sont de 50 cm) Croyez-moi, j’en ai vu des choses au fond des puits » abonde Jérôme. « Un puits se nettoie en moyenne tous les 10 ans. Cela dépend des types, certains n’auront besoin d’être nettoyés que tous les 30, 50 ans. Il y a quand même des indices. Si dans votre puits plein d’eau, vous avez même une fine pellicule blanche, un peu comme une tâche d’huile sur la surface, la qualité de l’eau et le puits ne sont pas optimaux, vous pouvez m’appeler. » indique-t-il.
Et concernant la qualité de l’eau ? « Jusqu’à il n’y a pas si longtemps, il suffisait au propriétaire du puits de puiser l’eau avec une pompe (sans même la filtrer), l’eau était buvable directement pour la consommation humaine. Aujourd’hui, personnellement, je ne le recommande pas ». En effet, les veines d’eau de surface, alimentées par la pluie et qui remplissent les puits, tendent à être polluées. La consommation de l’eau du puits (comme son installation et utilisations) sont encadrées par la loi. Pour la consommation, d’une manière générale l’eau issue d’un puits est considérée comme non potable, sauf si elle a été analysée et validée par des experts, via le réseau de Direction de l’action sanitaire et sociale (DASS) de votre département. De même, elle ne peut être utilisée pour l’alimentation que si l’habitation n’est pas raccordée au réseau public, et qu’après un traitement spécifique de potabilisation.
Le puisatier s’est donc donné comme mission première d’entretenir et rénover les puits déjà existants. Les services sont divers, cela peut aller du débouchage du puits, à la pompe envasée, des puits qui débordent, ceux ensablés… ou bien des travaux plus divers tels que de la maçonnerie, en collaboration avec un maçon qui vient le guider sur place. Jérôme peut aussi intervenir pour la construction d’un nouveaux puits (bien que cette activité soit plus rare) : « pour réaliser un puits à l’ancienne, cela prend en moyenne 3 mois; aujourd’hui, pour des puits modernes, une après-midi peut suffire…». Il intervient sur tous les types de puits : ceux creusés dans la roche, les bâtis (les plus répandus), ceux en béton, ceux en série, des puits des plus grands aux plus petits, tels que 70 cm de diamètre…
L’homme, également sourcier, identifie les sources d’eau, que ce soit pour un forage ou un futur puits, en recourant aux baguettes, pendule, mais aussi, avec son seul ressenti corporel, et notamment son rythme cardiaque. Il peut aussi détecter des fuites d’eau, si besoin (pour rappel, le taux de perte d’eau potable en France, causé par les fuites dans les canalisations, est d’environ 1 milliard mètre cube annuels).
« Mon taux de réussite est de plus de 90 % ; bien sûr, parfois, je peux indiquer la présence de l’eau en profondeur avec une marge de différence de quelques mètres. Côté tarifs, il faut envisager 1 500 € pour un nettoyage de puits, en 2 h ; pour des travaux supplémentaires, 100 € de l’heure, sans compter les frais déplacement » annonce Jérôme.
Michaël Fayret, botaniste, et producteur de plantes et fleurs comestibles, vient de faire nettoyer son puits, à Sainte-Croix, par le puisatier. « J’ai fait appel à Jérôme pour vider et nettoyer un puits sur mon terrain, qui présentait un trop plein d’eau. Nous avons tous les deux retiré 1m50 de vase ; même la pompe, que je croyais finie, était en fait simplement prise. En quelques jours à peine, on voit déjà la différence: la veine d’eau s’est re-activée, le puits s’est rempli, et le débit est régulier ». Michaël destine son puits à l’irrigation de ses plantations. « Comme l’eau du puits ne gèle pas forcément (-si l’eau est puisée en dessous de la ligne du gel-) prochainement, j’aimerais tester un système d’aspersion aérien, anti-gel, pour hydrater mes plantes en hiver. A l’avenir, je n’exclue pas d’abreuver les animaux de ma ferme, en court d’installation ».

Le forage, pour des consommations plus importantes

Lionel Comby, à la tête de l’entreprise de forage Batco depuis 2018, travaille avec le sourcier depuis un an. Avant de faire un forage, le client recourt d’abord à l’analyse du sourcier. Le foreur, tout comme Michaël Fayret, confirment l’efficacité de M. Souques pour ses interventions. « Aujourd’hui comme demain, chez nous en Aveyron, le vrai problème selon moi n’est pas tant le manque d’eau, mais plutôt la gestion des stocks sur la durée… et la qualité de cette eau. Même dans un territoire préservé et qualitatif comme le nôtre, la potabilité de l’eau est bien devenue cette problématique et enjeu majeur de notre époque, au delà de nos frontières » estime Lionel Comby. Il en évoque d’autres : « nous ne sommes pas les départements les plus peuplés, et dès qu’il y a un surplus de consommation d’eau, en périodes touristiques par exemple, nos réseaux de tuyauterie, qui n’ont pas été calibrés assez gros, ont un peu de mal. L’eau arrive en débit réduit, et souvent, les agriculteurs sont en dernière ligne ».
Le métier de foreur, lui aussi, tend à se raréfier. De fait, les deux spécialistes interviennent tous deux dans la moitié de la France, du Roussillon jusqu’à Orléans ou Clermont-Ferrand.

Elisa Llop ©VP12

Témoignages de forage Batco

Gisèle Raffy, éleveuse bovin viande à Saint-Santin (Aveyron)
Gisèle et Christian Raffy ont réfléchi à un projet de forage suite aux augmentations du coût de l’eau. « Il arrive que nos bêtes endommagent des tuyaux ou conduites et s’il y a des fuites les factures deviennent vite très conséquentes ! Notre fils a vu un forage chez un agriculteur et il a été convaincu ».
Encore fallait-il trouver l’eau et l’entreprise car il n’y a qu’un seul fournisseur possible à Saint-Santin. Les exploitants ont fait appel à BATCO qui gère des projets de recherche d’eau et de forage. Au départ, l’eau a été trouvée à 200 m d’un premier bâtiment, ce qui générait des coûts de plomberie assez importants, puis en remontant la veine d’eau, le forage a pu se faire au pied du bâtiment. Il a fallu descendre à 93 m pour trouver l’eau. La pompe immergée est placée à 85 m afin d’éviter tout engorgement par du limon. « En 5 jours, en juin 2021, le chantier était fini et tubé. La mise en route s’est faite en juillet après la venue de notre plombier ». Gisèle et Christian avaient anticipé les branchements pour les eaux usées de leur maison. Aujourd’hui ils utilisent l’eau du forage dans tous les bâtiments de ferme, sur toutes leurs parcelles, à leur domicile et également sur le bâtiment d’engraissement de l’exploitation voisine de leur fils, soit 80 bêtes toute l’année. « L’eau sort toute l’année à 13°, avec un débit constent de 4m3/heure ».
« Je sais que nos bêtes ont toujours de l’eau, dans tous nos champs, de plus nous avons des terrains en pente et nous n’avons plus à prendre le tracteur pour déplacer la tonne pour faire boire les bêtes ». Encore un avantage pour cet investissement qui pour un coût total de 18 000€ (12 000€ de forage et 6 000€ de plomberie), a été rentabilisé en 3 ans.

 

M. Lavinal, éleveur lotois de canards, Limousines, brebis et chèvres (Lot)
Le projet de forages est né suite aux coûts de fonctionnement en eau de l’exploitation. Installé depuis 2009 et rejoint par sa compagne en 2023, sur un deuxième site, l’éleveur payait à ce moment-là 10 000€ d’eau, et ce malgré un syndicat des eaux établi sur plusieurs petites communes qui proposait un tarif assez raisonnable. Afin de pallier les augmentations liées à la nouvelle structure de l’exploitation, 2 forages ont été réalisés par BATCO, il y a 3 ans (50 m et 60 m).
Sur la mise en œuvre du chantier, l’eau était exactement à l’endroit défini par l’étude des cartes hydrogéologiques, il n’y a pas eu de surprise !
Le forage a duré 2 jours pour chaque site pour arriver au gisement d’eau et ensuite 10 jours pour que les deux sites soient opérationnels. Le coût de 25 000€ a été rentabilisé en 3 ans. Ici les forages servent exclusivement pour la production animale. « On aurait dû faire le pas bien avant, on a eu affaire à une équipe de grande compétence. Quant à la qualité de l’eau, nous faisons des analyses obligatoires 2 fois par an au printemps et à l’automne sur les périodes où elle est le plus chargée en bactéries et elle est toujours très bonne. On fait juste un traitement coliforme en préventif pour éviter des diarrhées. Les canards sont une des productions les plus fragiles et on a de meilleurs résultats qu’avant ».

Propos recueillis par Isabelle Cabot