Chronique d’un gourmand

Ce matin, j’ai accepté l’invitation de Christelle Grialou pour explorer la ferme familiale nichée dans la vallée de la Thèze à Saint-Martin-le-Redon, un lieu où l’histoire agricole se transmet depuis 1789.

Au sortir de la traite matinale, je suis convié dans l’intimité du petit-déjeuner dans la cuisine – véritable cœur de la maison de ses parents – où un café fumant m’était servi. Christelle, qui a repris l’exploitation en 2011, m’accueille avec une simplicité désarmante et l’enthousiasme d’une passionnée qui conjugue héritage familial et innovation.

Les regards se tournent vers ses 45 Prim’Holstein, dont le lait, à hauteur de 365 000 litres par an, se transforme pour partie en délices irrésistibles. Sous ses mains expertes, le lait s’incarne en glaces fermières aux parfums surprenants – fraise, chocolat, vanille et ce fameux caramel beurre salé (il parait qu’une glace Rhum-Raisin est en préparation) – sans oublier le skyr, spécialité onctueuse qui redéfinit l’art du yaourt.

L’histoire de la ferme s’est d’abord écrite avec la vigne, lancée en 1985 suite à l’instauration des quotas laitiers de 1984, avant que les aléas climatiques et les mutations du marché ne recentrent les ambitions de la famille sur la production laitière. En 2024, l’adhésion au réseau « Bienvenue à la Ferme » a ouvert de nouveaux horizons, conférant une visibilité accrue à ses créations sur les marchés des producteurs locaux ainsi qu’à la Halle de Cougnac, et lors des festivités de fin d’année.

Au cours de la visite du laboratoire inauguré l’été précédent, Christelle confectionne avec soin une crème glacée au caramel beurre salé. Dans ce lieu où tradition et modernité se marient, elle m’explique l’équilibre subtil entre le travail de la ferme – deux traites quotidiennes, soins attentifs aux vaches, entretien des champs – et la minutie de la transformation artisanale. Les vaches, gambadant librement en pâturage plus de 300 jours par an, incarnent l’harmonie entre bien-être animal et respect du terroir.

Les chiffres traduisent une organisation rigoureuse : environ 60 % du temps est dédié aux tâches agricoles, 25 à 30 % à l’élaboration et à la valorisation des produits, et les 10 à 15 % restants aux impératifs administratifs. Par ailleurs, Christelle cultive sa présence sur les réseaux sociaux vecteurs d’un savoir-faire qui séduit autant les gourmands locaux que les touristes en quête d’authenticité.

Au fil de cette matinée riche en échanges, j’ai découvert non seulement l’art des glaces artisanales issues du lait de la ferme, mais aussi l’âme d’une agricultrice qui, par son énergie et sa vision, perpétue et réinvente la tradition rurale. Pour les amateurs de plaisirs simples et authentiques, un détour par le Domaine du Buis s’impose : un voyage sensoriel où chaque cuillerée raconte l’histoire d’un terroir et d’une passion.

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